Le flop de Great Place to Work

In Nos tracts

La facilité avec laquelle la Direction renonce à comprendre les scores médiocres de l’enquête Great Place To Work est déconcertante[1]. Rien de ce que font les hommes et les femmes n’est inintelligible. Dire : « je ne comprends pas », « je ne peux pas comprendre » est toujours une défaite.

S’en tenir à présenter les salariés de Worldline comme des enfants gâtés méconnaissant la dure réalité du monde professionnel s’apparente pour la Direction à une déroute de la pensée[2].

Refusons d’abandonner notre Direction ! Aidons-la à comprendre !

Le contrôle et la rationalisation

Un premier élément d’analyse des mauvais scores réside dans une tendance s’affirmant depuis plusieurs années au renforcement du contrôle et à une rationalisation accrue de nos métiers.

A tous les niveaux de l’entreprise fleurissent de nouveaux outils et de nouvelles consignes qui viennent alourdir nos process décisionnels et minimiser l’autonomie et la marge de manœuvre des salariés.  On pense par exemple à la lourdeur des contrôles de l’outil SHOP introduit aux achats, au durcissement des procédures de validation des appels d’offres chez les managers, à l’imposition de certaines technologies à nos ingénieurs venant parfois nier leurs expertises, etc.

Cela déplait évidemment car nous avons l’impression récurrente d’être pris dans un fonctionnement de plus en plus « machinique », sans que nous en comprenions toujours bien l’intérêt. Certaines des nouvelles procédures semblent dépourvues de toute utilité pratique, elles nous gênent dans la bonne réalisation de nos métiers et traduisent plus l’incapacité galopante de la Direction à nous faire confiance.

Les mauvais résultats de l’enquête sont d’abord l’expression de la remise en cause d’un contrat de confiance entre nous tous et la Direction.

Ce contrôle s’accompagne d’une rationalisation de nos métiers (nous sommes moins polyvalents et plus confinés à certaines tâches) qui laisse souvent un goût amer et l’impression d’être réduit à n’être qu’une force de travail perpétuellement interchangeable. Ajoutez à cela l’étroitesse unidimensionnelle de la direction, indifférente à toute considération autre que comptable et vous obtenez finalement une organisation du travail qui semble pouvoir de plus en plus se passer de nous :

  • Délocalisation de certaines tâches des activités de la DAF en Pologne
  • Lancement d’un pilote offshore au Maroc sur la gestion de niveau 1 du front office SIPS
  • Création d’une élite au sein des ingénieurs (les experts) et lancement des recrutements de techniciens (ce qui est très bien pour eux mais plus inquiétant sur le devenir des ingénieurs « classiques »)
  • Montée en puissance des ingénieurs offshore avec certaines releases de projet développées à 100% par des ingénieurs offshore (Carrefour par exemple).

Cela reste encore une impression, sans que les conséquences de ce tournant soient toujours palpables. Néanmoins nous comprenons bien que les choix de la Direction nous entrainent vers un devenir où les matins pourraient déchanter prochainement. La confiance d’hier s’éloigne, nous nous méfions aujourd’hui d’une organisation du travail de plus en plus nuisible.

Les mauvais résultats de l’enquête Great Place To Work sont aussi l’expression de notre méfiance.

Le don et le contre-don

Le fonctionnement normal d’une entreprise, et celui qui était précédemment en vigueur au sein de Worldline, peut être décrit ainsi : nous étions tous, Direction et salariés, pris dans un cycle vertueux de dons réciproques. Nous donnions un jour tout en sachant que la Direction nous le rendrait plus tard. Et inversement, la Direction savait donner en confiance convaincue que notre implication future serait à la hauteur de son don. Ce cycle d’endettement mutuel structurait et stabilisait nos échanges entre la Direction et nous tous[3].

Alors pourquoi finalement cela ne marche plus ?

Nous pensons à la lumière de cette analyse que le cycle d’endettement nous liant a été rompu par la Direction depuis quelques années. Alors que les salariés n’ont pas cessé de donner, la Direction, elle, ne donne plus rien ou si peu en échange. Et c’est bien ça qui pourrait expliquer en partie nos scores médiocres, moins bons que ceux du groupe Atos. Nos mauvais résultats reflètent finalement l’accumulation de l’endettement de la Direction auprès de ses salariés. C’est parce que nous donnons énormément sans rien recevoir que nous sommes mécontents.

Plusieurs solutions se présentent alors à nous. On peut se mettre à donner moins à la mesure de ce que l’on reçoit en moins ; on est alors moins frustré, mais Worldline perd encore un peu plus de son attrait. Alors que si l’on donne autant et que la direction recommence à donner à son tour, le cycle d’endettement redémarrera.

La Direction doit prendre en compte notre mécontentement qui s’exprime à travers les résultats de l’enquête Great Place To Work. Elle doit s’engager sans attendre dans une véritable réflexion visant une organisation du travail moins autoritaire, plus propice à l’épanouissement de tous et améliorant la qualité de vie des salariés au sein de Worldline.

Bien à vous,
Toute l’équipe de la CFTC

[1] La Direction lors du comité d’entreprise de février 2016 expliquait aux élus que cette enquête reflète une immaturité des salariés qui ne répondent pas objectivement aux questions dans un contexte de montée des inquiétudes et des peurs.

[2]C’est l’idée qui ressort des discussions entre les élus du comité d’entreprise et la Direction.

[3] Voir La sociologie du monde du travail sous la direction de Norbert Alter et la présentation des analyses de Marcel Mauss sur la théorie du don.

PS: Image courtesy of emily9 at FreeDigitalPhotos.net

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